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Oleg Bogatov, un jeune Letton de 33 ans, fâtera la nouvelle année, non sous la neige de Riga, mais sous les premiers flocons bretons. L'hospitalité de la famille Le Coz, de Loudéac, lui a fait braver la kafkaienne administration de son pays, et 3.000 km de bus pour découvrir l'âme celte.
C'est l'histoire d'une amitié, née sous le signe de... l'Histoire. De l'histoire qu'Alain Le Coz, 32 ans, magasinier en bibliothèque, étudie en troisième cycle à Paris. Elle a débuté voici presque trois ans.
Francophilie et bonapartisme
« Un copain russe, professeur à Saint-Pétersbourg, m'a parlé d'une association. Elle produisait des spectacles de reconstitution de batailles napoléoniennes. Si en France, Napoléon est souvent perçu comme un dictateur, dans l'ex-URSS, l'empereur est synonyme de... liberté. Il a fait souffler, sur la terre des tsars, les idées de la Révolution française. Il y a dix ans, monter ce genre de spectacles dans l'ex-URSS était une forme de résistance ! »
En dix ans, les choses ont évolué pour cette association aussi. Elle a pu s'ouvrir à l'Ouest, « bataillant » de Belgique en Allemagne ou en France. En février 94, elle est invitée à Nîmes qui se prépare à fêter le 500* anniversaire du troisième régiment d'infanterie. « II manquait un figurant. J'ai été engagé aux côtés des 200 personnes de la troupe. Parmi les soldats, se trouvait Oleg ».
Découvrir le monde
Oleg Bogatov est assistant ingénieur en électro-mécanique, spécialisé dans les moteurs de train, à Riga où il est né. Comme beaucoup de Lettons, il est d'origine russe, ce qui ne facilite pas sa vie matérielle.
Les nouvelles lois raciales, bien que dénoncées, lui barrent l'accès à tout poste important.
« Je ne gagne que 800 F par mois. Or, la nourriture est presque aussi chère qu'en France.
Mais, avec ces représentations, je peux voyager sans bourse délier ».
Solide amitié
Depuis cette première rencontre, Alain Le Coz a continué, épi-sodiquement, « à jouer les soldats de plomb », comme il le raconte. Il est le seul français de la troupe, avec Jean-Louis Viaud, journaliste-organisateur des spectacles dans l'hexagone. « De Waterloo à Austerlizt, les mises en scène changent, orchestrées par les historiens 'de l'association. Cette recherche est souvent passionnante ».
Son amitié avec Oleg s'est renforcée par des voyages en Lettonie, « une région aux paysages superbes, qui a quarante ans de retard par rapport à notre pays. Mais, le matérialisme ne procure pas forcément le bonheur. Les rares touristes étrangers apparaissent comme des extra-terrestres. Et lorsqu'on est français, on s'aperçoit que le vieux fond francophile des Russes n'est pas une légende ».
Au jour le jour
De la France, Oleg ne connaissait guère que Paris et quelques grandes villes. La famille Le Coz a souhaité lui faire aimer la Bretagne, à l'occasion des fêtes de fin d'année. « II a fallu entreprendre 36.000 démarches pour le faire passer la frontière ». Les 3.000 km de car valaient la peine d'être affrontés.
Arrivé en Bretagne, peu avant Noël, Oleg, dans un anglais hésitant, décrit ses impressions : « Je suis comme Christophe Colomb débarquant en Amérique ». Alain l'a promené de Saint-Malo à Vannes, en passant par les châteaux des. Rohan ou les menhirs de Carnac. Oleg voulait tout comprendre du patrimoine culturel ou de l'âme celte. Pour autant, il reste attaché à son pays, où il a laissé sa femme, Natacha et sa fille Sve-tlana : « Je vis au jour le jour, en espérant que les choses s'améliorent. Tout y est plus nuancé que certains clichés le montrent souvent. Je regrette surtout que tous les enfants ne puissent être scolarisés ».
A son retour, il fera une émission de télévision sur son séjour Une ou plusieurs ?
A. Quelver
Noël loudéacien pour un Letton
A l'invitation d'Alain Le Coz et de toute sa famille, OIeg Bogatov, un Letton de 33 ans, passera une partie des fêtes de fin d'année à Loudéac. Au 41, rue de Cadélac, la famille Le Coz a l'habitude des réunions comos-polites, ayant des amis sur toute la planète !
OIeg n'a pas été trop pertubé par le froid qui règne actuellement sur le pays. Chez lui, à Riga, au bord de la mer baltique, le thermomètre frôle les moins 30 degrés ! Par contre, cette découverte en
touriste de la France profonde et plus particulièrement de la Bretagne, où il vient de séjourner pendant une semaine fut un choc : « j'ai l'impression d'être Christophe Colomb arrivant en Amérique ! »
Mais, pour rien au monde, il ne quitterait sa terre d'origine. Même si ses conditions de vie, en raison de conflits raciaux (il est d'origine russe), ne sont pas faciles, dans une Lettonie qui manque de tout...